Uranium appauvri et contamination collatérale sur un terrain de conflit armé

Uranium appauvri et contamination collatérale sur un terrain de conflit armé

Qu’est-ce que l’Uranium appauvri ?

La principale différence entre l’Uranium appauvri et l’Uranium naturel est le contenu en isotopes U235, auquel est attribuable la fission nucléaire. L’Uranium appauvri contient moins d’U235 que l’uranium naturel.

L’Uranium est un minéral dense, blanc argenté et d’origine naturelle. Il contient deux principaux isotopes qui sont les suivants :

  • U238 (99,27 % de la masse totale)
  • U235 (0,72 % de la masse totale)

Seul l’U235 est fissile, c’est-à-dire que soumis à un flux de neutrons, il peut provoquer une réaction en chaine au contact d’autres atomes d’U235 et ainsi libérer une énorme quantité d’énergie.

En extrayant l’isotope U235 de l’Uranium naturel, les installations d’enrichissement de l’Uranium produisent de l’Uranium enrichi, surtout utilisé comme combustible dans les réacteurs nucléaires.

L’Uranium naturel est donc enrichi afin d’augmenter sa teneur en isotope U235 de 0,72 % à 2 % voire 5 % pour l’Uranium faiblement enrichi utilisé pour les réacteurs de puissance (Centrales nucléaires)

L’Uranium appauvri est un sous-produit de l’enrichissement de l’Uranium. Les matières qui restent après la production de l’uranium enrichi sont considérées comme de l’uranium appauvri. Il est peu radioactif et environ 60 à 40 % moins radioactif que l’Uranium naturel.

Cette concentration isotopique vacille généralement entre 0.2 et 0.4% en U235 et trahit avec certitude une origine anthropique et non naturelle.

Pourquoi l’Uranium appauvri (UA) est-il utilisé sur certains champs de bataille ?

Le développement de l’industrie nucléaire civil a généré d’énormes quantités d’UA considéré alors comme un sous-produit sans emploi. On comprend ainsi pourquoi, dès les années 1960, les industriels du nucléaire se sont préoccupés de trouver des débouchés permettant de valoriser cet UA.

L’UA est un métal très lourd. Sa densité est de 19 050 kg m−3 alors que la densité du plomb « n’est que » de 11 340 kg m−3 (Soit près du double !). Qui plus est, il possède un point de fusion convenable de 1135°C.

L’énergie cinétique est calculée par la formule suivante :  E(c) = 1/2 x m x V2

« m » est la masse exprimée en kg et « V » la vitesse exprimée en m/s. Il devient donc évident qu’un projectile composé d’UA aura une énergie cinétique bien supérieure à d’autre métaux tels que le Plomb ou l’acier avec un impact sur une cible bien plus important.

De plus, soumis à un violent impact, l’UA est pyrophorique. C’est-à-dire qu’il s’enflamme spontanément dans l’air à très haute température et en l’occurrence lors de l’impact ce qui accentue son effet destructeur.

Aussi, l’utilisation de l’UA pour fabriquer des munitions perforantes, pyrophoriques à l’impact ou des blindages très résistants est devenue presqu’une « norme » pour certaines armées dont les US qui ont été les précurseurs en la matière.

Concernant l’armée US, un inventaire* non exhaustif, peut être fourni :

  • Les munitions de petits calibres :
  • Munitions de 7,62 mm (calibre 50). Ces balles de petite dimension sont également appelées « fléchettes ». Elles ont été adoptées pour le fusil américain M14 de calibre 7,62 mm et pour le M16 de calibre 5,56 mm25 
  • Munitions de 20 mm MK 149
  • Munitions de 25 mm PGU-20 : anciennement utilisées par l’U.S. Navy
  • Munitions PGU-20/U : en service dans l’armée de terre et fabriquée par Primex Technologies 26 (St-Petersburg, Floride)
  •  Munitions de 25 mm M 919 fabriquées par Olin Ordnance (Marion, Illinois) et antérieurement par Aerojet Manufacturing (Chino, Californie), et aujourd’hui par Primex Technologies (St-Petersburg, Floride) 
  • Munitions de 30 mm PGU-14 (pour l’avion tueur de chars A-10)
  • Les pénétrateurs pour obus antichars :
  • Pour les obus de 105 mm : M735A1, M774, M833, M900. Tous ces modèles ont été fabriqués aux ÉtatsUnis par Primex Technologies (nouveau nom de Nuclear Metals Inc.)
  • Le M829 : a été fabriqué par Chamberlain Manufacturing Corporation (Waterloo, Iowa), Alliant Techsystems Inc. et Primex Technologies pour le canon du char M1A1 Abrams.
  • Le M829A1 a été fabriqué par Alliant Techsystems Inc. pour les canons des chars Abrams M1A1 et M2A2. C’est cette version de pénétrateur (sur les chars M1A1) qui a été utilisée lors de l’opération « Tempête du désert »
  • Le M829A2 est fabriqué par Primex Technologies. En 1995, le Department of Defense a commandé 23 278 exemplaires de ce pénétrateur.
  • Le M829E3 est un modèle en développement. Alliant Techsystems Inc. a remporté les contrats de développement et de production de ce nouveau pénétrateur.

Source

Cette liste, qui date de quelques années n’est, bien sûr, pas exhaustive et de nouvelles munitions à UA ont vu le jour depuis. De plus, ne sont pas mentionnés certains blindages ou mines antipersonnel qui contiennent aussi de l’UA.

Conséquences collatérales radiologiques :

Tous les isotopes de l’uranium sont radioactifs. L’UA est considérablement moins radioactif que l’uranium naturel. La différence est habituellement de l’ordre de 60 à 40 %. La radioactivité provient principalement de particules Alpha, qui ne pénètrent pas la peau. Une simple feuille de papier à cigarette tout comme l’épiderme de la peau permet de stopper ce rayonnement Alpha. À ce stade l’UA est donc totalement inoffensif.

Cette innocuité n’est cependant plus assurée en cas de pénétration de balles de petits calibres ou d’éclats d’obus dans le corps. À ce moment-ci, on a affaire non plus à une contamination externe où une simple douche suffirait à se décontaminer mais à une contamination interne qui va toucher de nombreux organes internes et bien sûr tous les fluides comme le sang.

Cependant, il y a beaucoup plus insidieux et pire !

Prenons l’exemple d’un obus perforant en UA.

Lorsque ce dernier va atteindre sa cible (par exemple, un tank), l’énergie cinétique va faire que l’obus va rentrer partiellement ou totalement en fusion (à partir de 1135°C) et un amalgame de métaux (Cible + obus) va se diffuser sous forme d’aérosols dans l’atmosphère.

Parmi ces aérosols, on va, bien entendu, retrouver des nanoparticules d’UA dans l’atmosphère qui peuvent se disséminer au gré des vents à plusieurs kilomètres à la ronde.

Sans un EPI adapté comme un masque à cartouche filtrante à charbon actif, les deux camps adverses vont inhaler ces particules Alpha avec pour conséquence une contamination interne susceptible de provoquer à terme des maladies et des cancers.

À noter que cette poussière radioactive peut rentrer aussi par les yeux et que le port de lunettes spécifiques se révèlera de même indispensable.

Enfin, il a été rapporté un « syndrome de la guerre du Golfe » puis un « un syndrome des Balkans » qui ont été imputés aux effets éventuels de l’emploi d’armes à UA. Les syndromes invoqués sont variables suivant qu’ils concernent les civils (Leucémies, malformations congénitales chez les enfants, cancer du sein, etc.) par l’inhalation d’UA et l’ingestion d’eau et d’aliments contaminés ou chez les combattants (fatigue chronique, perte de mémoire, capacités respiratoires réduites…). 

Se pose juste une question d’ordre éthique pour conclure :

Doit-on interdire ces armes qui sont tout sauf conventionnelles et qui peuvent tuer sans discrimination ?…

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